UTOYA:L’île noire de Laurent Obertone
Le nom est indélébile désormais. Utoya. Une île norvégienne au charme tellurique qui bascula dans l’enfer le 22 juillet 2011.
Pour son deuxième ouvrage, Laurent Obertone retrace, à la première personne, l’itinéraire fiévreux et effrayant d’Anders Breivik, l’homme qui abattit froidement 77 personnes sur cette île après avoir fait exploser une bombe à Oslo. Le récit est implacable, violent, émétique et glacé. Osant ce pari risqué et fort controversé, Obertone intègre la tête du tueur pour nous narrer par le menu la tuerie, la préparation de l’attentat d’Oslo, le délirant manifeste de 1515 pages rédigé par Breivik afin de justifier son action et le procès qui suivit son arrestation. Ponctuellement, les récits des survivants, des psychiatres, des policiers, viennent émailler ce texte déstabilisant et parfaitement documenté. En effet, si l’auteur est à créditer d’un travail d’enquête considérable, il n’en demeure pas moins un romancier à la plume brillante, fusse-t-elle plongé dans un bain de sang et de controverse. Certes, les détracteurs de ce livre – dont la plupart ne l’ont pas tout bonnement pas lu à en juger leurs critiques! – n’ont pas hésité à prêter à l’auteur une réelle empathie pour les théories fumeuses du tueur. Ce n’est pourtant pas l’impression qu’il reste, sitôt l’ouvrage refermé, d’autant plus que les témoignages des survivants résonnent au cœur comme jamais et que le livre est précédé d’un avertissement en bonne et due forme. Oui, Breivik n’apparaît pas comme un « simple » psychopathe et c’est en cela que le remarquable livre d’Obertone est dérangeant mais nécessaire. Ce tueur de masse s’avère en effet d’autant plus dangereux qu’il est intelligent et rationnel.
UTOYA, Laurent Obertone (Ed. Ring – 20 euros)
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